• « La quête d’un père », Jean-Louis TANGUY, en mémoire de son fils Guillaume. (34 pages) Guillaume Tanguy, né à Guissény le 31 mai 1898, est incorporé dans l’armée en mai 1917 et rejoint le Front en février 1918. Il y trouve la mort le 26 octobre 1918, à l’âge de 20 ans, quinze jours avant l’armistice.

C’est avec émotion que nous avons ouvert le cahier tenu par le père d’un jeune Guissénien, tué au front en 1918. Il y est joint la dernière lettre écrite par le père et la brève réponse du fils, écrite à la veille de sa mort. Aucune emphase, des mots simples derrière lesquels on devine l’angoisse de tous et l’on pressent le drame. Le 21 octobre 1918, sur une toute petite fiche, le père raconte la vie de la ferme mais aussi son analyse de la situation générale. L’espoir est exprimé : « … en te sachant en bonne santé », c’est-à-dire vivant ; ainsi que l’angoisse : « … nous commencions à nous ennuyer… ». Le 25 octobre, le fils répond : « …pas le temps d’écrire plus, çà barde trop ».

Le 26 octobre 1918, Guillaume est tué sur le front, à 20 ans et 5 mois.

Etant donné le nombre de morts et disparus de déjà trois ans de guerre (près de 80 à Guissény), quand les garçons de la classe 18 ont été mobilisés en 1917, à tout juste 19 ans, il était devenu évident qu’une affectation dans l’Infanterie était presque une condamnation au martyre.

A cet âge, on est souvent encore presque un enfant. Comment les parents ont-ils pu supporter de voir partir leur fils vers l’inconnu et un danger extrême, et d’être ainsi écarté de leur rôle de guide et de protecteur ?

Né le 31 mai 1898 à Guissény, Guillaume TANGUY de la classe 1918, matricule 1819 au recrutement à Brest, est incorporé le 1er mai 1917 sous le matricule 17107, soldat de 2e classe, au 128e Régiment d’Infanterie à Landerneau. Il y restera à l’instruction jusqu’à son départ pour le front en février 1918.

Sur un cahier d’écolier, le père retrace toutes les étapes de la vie du soldat d’après les lettres reçues du front et conclu :

  • Immolé
  • Il a bravé la mort et bu toute la lie de son calice.

A la Toussaint de 1919, le père part retrouver la tombe de son fils. C’est un véritable pèlerinage vers les champs de bataille qui le fera repasser par les mêmes lieux, empruntant les voies ferrées, développées pour le transport des troupes. Il note tous les détails de ce voyage, puis dessine la tombe de son fils, celles environnantes et la couronne qu’il a apportée.

Publié après sa dissolution le 12 mars 1919, un petit livret retrace la campagne de guerre du 320e Régiment d’Infanterie. Le père annote en marge du texte tous les lieux où son fils est passé et les combats auxquels il a participé depuis le premier engagement de Guillaume TANGUY dans le saillant de Saint-Mihiel jusqu’au combat de La Selve au-dessus de Craonne où il est tombé.

C’est la reprise de la guerre de mouvement, l’ennemi recule mais son expérience rend tous ses mouvements dangereux. A ce stade du conflit, les belligérants ont acquit un professionnalisme extraordinaire et on est saisi par la mobilité des unités déplacées sur presque tout le front et de la logistique qui en découle. On note aussi l’engagement de moyens de combats « modernes » : les chars, les avions…

En 1921, le corps de Guillaume est ramené à Guissény où son nom figure sur le Monument aux Morts avec tant d’autres.

Le témoignage et la quête du père sont sans doute rares mais certainement exemplaires d’une douleur extrême, partagée par tant de parents qui auront perdu un ou plusieurs fils dans cette guerre.

Nous donnons des extraits de l’historique du Régiment concernant cette période pour laquelle il a été cité à l’ordre de l’Armée. Derrière les faits rapportés en termes militaires, combien de drames comme celui vécu par cette famille ?

(à suivre…)

Au cours de l’année 2012, Spered a édité ce fascicule en production interne (imprimante et photocopie) qui est disponible auprès de l’association moyennant une participation aux frais de reproduction.