Ecole des Filles

Historique de l’école des filles Sainte-Jeanne-d’Arc à partir des archives de la Congrégation de Saint-Méen-Le-Grand qui a créé cette école à Guissény à la demande du Recteur en 1854.

Avant 1854, la paroisse de Guissény n’avait pas d’école pour les filles. Les familles aisées envoyaient leurs enfants comme pensionnaires ou comme externes dans les paroisses voisines. Les pauvres n’avaient pas d’autre éducation que celle de la maison paternelle. Il y avait beaucoup d’illettrés à Guissény et bon nombre de malades restaient sans soins.

En 1854, sur la demande de Monsieur Gourhant, recteur de la paroisse, sœur Ste Marie et sœur Ste Eugénie arrivèrent à Guissény pour aménager la maison qu’on leur destinait. C’était l’ancien presbytère qui a été laïcisé en 1906 et qui existe aujourd’hui sous le nom de « ar Gouenn Koz ».

En 1855, sœur St Lucien fut envoyée à Guissény. Elle y mourut en 1889 après 34 années de dévouement à la gloire de dieu et au bien du prochain. Le nombre des élèves augmentant rapidement, on dut, en 1856, ouvrir une nouvelle classe. En face de la communauté se trouvait une chaumière à 5 petites ouvertures sans vitres. C’est là que fut installée la nouvelle classe qui comptait 60 à 70 fillettes.

Outre le soin de sa classe, sœur St Marie visitait les malades à pied et à cheval sans craindre ni le vent, ni la pluie, ni la glace, ni même les mares d’eau si fréquentes alors dans le pays. Sœur Ste Victoire était pharmacienne, elle faisait des cures merveilleuses, mais il lui arrivait parfois des aventures. Un soir d’hiver, elle quitta le bourg à 4 heures, à cheval, pour aller visiter un malade. Elle s’égara et, pendant 3 heures, parcourut Curnic et la grève. Elle ne put rentrer qu’à 9 h du soir.

Sœur Marie Arsène vint à Guissény en 1875 pour aider sœur Ste Victoire et la remplacer quand elle était appelée auprès des malades. Sœur Ste Victoire était d’un dévouement sans limites. Rien ne l’arrêtait : ni la fatigue, ni le danger de contagion quand il s’agissait de prodiguer des soins aux malades pauvres. C’est ainsi qu’en 1894, elle soigna une pauvre femme délaissée de tous, atteinte de fièvre typhoïde.

En 1890, grand deuil à l’Ecole de Guissény… deuil causé par la mort du vénérable Monsieur Gourhant, recteur de la paroisse et fondateur de l’école à laquelle il s’est dévoué pendant 37 ans.Il aimait visiter son école et savait encourager la bonne volonté des élèves. Il fut regretté de tous.

On dut faire appel à deux nouvelles religieuses : sœur St Thomas et sœur Marie Bernard furent envoyées à Guissény. Elles faisaient la classe et soignaient les malades. Le local devenant insuffisant, on agrandit l’école, mais les ressources firent défaut pour la meubler. En guise de bancs on installa des planches sur des mottes de gazon et quelques vieilles portes tinrent lieu de tables.

Elles furent reçues avec une grand cordialité. Tous s’empressaient de fournir, chacun selon ses moyens, les objets nécessaires à l’aménagement. Elles trouvèrent une armoire remplie d’ustensiles de cuisine… de linge… de couvertures… Le tout était offert spontanément par les bons habitants du pays.

A l’époque de la laïcisation en 1906, toutes les soeurs quittèrent Guissény sauf sœur Marie de St Pierre et sœur Ste Sophie qui n’occupèrent que quelques pièces de l’ancien presbytère. Elles continuèrent à faire classe aux fillettes qui n’avaient pas quitté la paroisse. Les habitants du pays étaient très bons pour elles et leur apportaient chaque semaine : pain, viande, lait.

En août 1907, les deux soeurs quittèrent Guissény : sœur Marie de St Pierre pour Plouescat et sœur Ste Sophie pour la Chapelle-du-Lou. La paroisse resta sans école chrétienne. Dès la fin de l’année 1908, Monsieur l’Abbé Marzin, recteur de la paroisse, fit construire un vaste bâtiment comprenant, outre la maison principale, trois classes et un grand dortoir.

Monseigneur Duparc bénit la nouvelle école en mai 109. Dès le mois de septembre de la même année, les classes purent s’ouvrir sous la direction de sœur Stéphanie qui eut pour adjointes sœur Marie de St Pierre, sœur Marie Herveline et Melle Cam. Cette dernière entra, à la fin de l’année, au noviciat de Saint-Méen et revint comme Supérieure à Guissény quelques années plus tard.

Juin 1933 - Quête dans la paroisse en vue de l’agrandissement de l’école. Courageusement, les religieuses parcourent la campagne. En très peu de temps, les nouvelles constructions sortirent de terre. Dès les premiers jours de février 1934, on put bénir un nouveau réfectoire, une classe et deux nouvelles chambres.

Octobre 1948 - Le cours ménager agricole ayant doublé son effectif, et les petits de la section enfantine étant trop à l’étroit, on envisage la construction d’un nouveau bâtiment. Ce sera l’œuvre de notre dévoué recteur, monsieur Calvez qui parcourut la paroisse sollicitant le dévouement et le concours de tous.

Dès le mois de mai 1949, les constructions sont terminées et Monseigneur Fauvel, lors de sa tournée de confirmation, bénit les nouveaux locaux qui comprennent, au premier étage, deux nouvelles salles réservées aux jeunes filles du cours ménager agricole ; et, au rez-de-chaussée, une salle claire et spacieuse destinée aux tout-petits.

Actuellement l’école compte cinq classes primaires… une section enfantine… et une section ménagère dont les cours s’échelonnent sur trois années d’étude et de travail pratique préparant nos adolescentes aux tâches et aux responsabilités de demain.

(à suivre…)

Fascicule consultable au local de Spered (le samedi de 14h30 à 16h30), à Ti an Oll, à Guissény.

Guillaume Tanguy

  • « La quête d’un père », Jean-Louis TANGUY, en mémoire de son fils Guillaume. (34 pages) Guillaume Tanguy, né à Guissény le 31 mai 1898, est incorporé dans l’armée en mai 1917 et rejoint le Front en février 1918. Il y trouve la mort le 26 octobre 1918, à l’âge de 20 ans, quinze jours avant l’armistice.

C’est avec émotion que nous avons ouvert le cahier tenu par le père d’un jeune Guissénien, tué au front en 1918. Il y est joint la dernière lettre écrite par le père et la brève réponse du fils, écrite à la veille de sa mort. Aucune emphase, des mots simples derrière lesquels on devine l’angoisse de tous et l’on pressent le drame. Le 21 octobre 1918, sur une toute petite fiche, le père raconte la vie de la ferme mais aussi son analyse de la situation générale. L’espoir est exprimé : « … en te sachant en bonne santé », c’est-à-dire vivant ; ainsi que l’angoisse : « … nous commencions à nous ennuyer… ». Le 25 octobre, le fils répond : « …pas le temps d’écrire plus, çà barde trop ».

Le 26 octobre 1918, Guillaume est tué sur le front, à 20 ans et 5 mois.

Etant donné le nombre de morts et disparus de déjà trois ans de guerre (près de 80 à Guissény), quand les garçons de la classe 18 ont été mobilisés en 1917, à tout juste 19 ans, il était devenu évident qu’une affectation dans l’Infanterie était presque une condamnation au martyre.

A cet âge, on est souvent encore presque un enfant. Comment les parents ont-ils pu supporter de voir partir leur fils vers l’inconnu et un danger extrême, et d’être ainsi écarté de leur rôle de guide et de protecteur ?

Né le 31 mai 1898 à Guissény, Guillaume TANGUY de la classe 1918, matricule 1819 au recrutement à Brest, est incorporé le 1er mai 1917 sous le matricule 17107, soldat de 2e classe, au 128e Régiment d’Infanterie à Landerneau. Il y restera à l’instruction jusqu’à son départ pour le front en février 1918.

Sur un cahier d’écolier, le père retrace toutes les étapes de la vie du soldat d’après les lettres reçues du front et conclu :

  • Immolé
  • Il a bravé la mort et bu toute la lie de son calice.

A la Toussaint de 1919, le père part retrouver la tombe de son fils. C’est un véritable pèlerinage vers les champs de bataille qui le fera repasser par les mêmes lieux, empruntant les voies ferrées, développées pour le transport des troupes. Il note tous les détails de ce voyage, puis dessine la tombe de son fils, celles environnantes et la couronne qu’il a apportée.

Publié après sa dissolution le 12 mars 1919, un petit livret retrace la campagne de guerre du 320e Régiment d’Infanterie. Le père annote en marge du texte tous les lieux où son fils est passé et les combats auxquels il a participé depuis le premier engagement de Guillaume TANGUY dans le saillant de Saint-Mihiel jusqu’au combat de La Selve au-dessus de Craonne où il est tombé.

C’est la reprise de la guerre de mouvement, l’ennemi recule mais son expérience rend tous ses mouvements dangereux. A ce stade du conflit, les belligérants ont acquit un professionnalisme extraordinaire et on est saisi par la mobilité des unités déplacées sur presque tout le front et de la logistique qui en découle. On note aussi l’engagement de moyens de combats « modernes » : les chars, les avions…

En 1921, le corps de Guillaume est ramené à Guissény où son nom figure sur le Monument aux Morts avec tant d’autres.

Le témoignage et la quête du père sont sans doute rares mais certainement exemplaires d’une douleur extrême, partagée par tant de parents qui auront perdu un ou plusieurs fils dans cette guerre.

Nous donnons des extraits de l’historique du Régiment concernant cette période pour laquelle il a été cité à l’ordre de l’Armée. Derrière les faits rapportés en termes militaires, combien de drames comme celui vécu par cette famille ?

(à suivre…)

Au cours de l’année 2012, Spered a édité ce fascicule en production interne (imprimante et photocopie) qui est disponible auprès de l’association moyennant une participation aux frais de reproduction.

La digue du Curnic

Digue

Histoire de la digue du Curnic-Nodéven : de la 1re digue détruite par la tempête à la 2e construite plus au fond de la baie et qui a créé le polder qui existe toujours aujourd’hui.

En 1830, un « sieur Troude », officier de Marine, de Brest, demande à obtenir la concession d’un « lais de mer » à Guissény, en vue de la construction d’une digue. Il abandonne ensuite sa requête au profit d’une dame Veuve Merven, de Ploudaniel. Un ingénieur des Ponts et Chaussées établit le plan de la digue et l’administration accorde la concession le 15 septembre 1831.

Il s’agit de l’ancienne digue, construite entre la pointe de Beg ar Skeiz et la pointe du Dibennou. La concession est accordée à des conditions très contraignantes fixées par les Domaines, comme on peut le voir dans l’ordonnance royale qui suit.

ORDONNANCE DU ROI Fait à Paris, le 15 septembre 1831

LOUIS-PHILIPPE ROI DES FRANCAIS

Vu la demande formulée par le sieur Troude, officier de Marine, demeurant à Brest, tendant à obtenir la concession gratuite d’un lais de mer situé à Guissény, arrondissement de Brest, département du Finistère ; Vu le plan des lieux, le devis des ouvrages à exécuter pour la construction d’une digue de dessèchement et le détail estimatif du même ouvrage, dressé par l’ingénieur ordinaire des Ponts et Chaussées, à la résidence de Landerneau. Vu l’enquête de commodo et incommodo arrêtée par le maire de Guissény, le 26 septembre 1830 ; Vu le procès-verbal des experts nommés pour opérer le mesurage, la délimitation et l’estimation du lais de mer de Guissény qui fixe la valeur en capital dudit lais de mer à 412 F. 60 c. ; Vu l’arrêté favorable du préfet du Finistère en date du 27 janvier 1831 ; Vu la demande de Mme Vve Merven, en date du 20 septembre 1830, par laquelle elle sollicite la même concession ; Vu la lettre de Mr Troude, en date du 1er janvier 1831, par laquelle il demande que le nom de Mme Vve Merven soit substitué au sien dans l’acte de concession ; Vu le Rapport du Conseil d’administration des Domaines, en date du 25 mars 1831, qui conclut à accorder à Mme Merven, la concession demandée ; Vu la lettre de notre Ministre des Travaux publics, en date du 3 juin 1831, qui adhère aux dispositions proposées par l’Administration des Domaines sous la condition qu’il sera établi dans le corps de la Digue un second aqueduc à clapet, qui pourra fonctionner lorsqu’il y aura lieu de réparer le premier ; Que dans chaque aqueduc il sera placé une vanne de sûreté, en cas d’avarie du clapet…


Cette ordonnance a été retranscrite dans le registre des délibérations de la commune, « pour copie conforme », le 21 octobre 1831.

La digue est achevée en 1832, largement avant le délai de dix ans prévu, mais sa construction n’a pas été sans conséquences pour les usages des habitants de la commune, concernant notamment la récolte du goémon et l’utilisation de la sécherie. Chaque année, au début du mois de janvier, le conseil municipal de Guissény publie un règlement très précis et contraignant pour l’organisation de cette récolte.

Le 20 janvier 1833, il doit s’occuper des problèmes issus « des empiétements qu’on fait journellement sur un terrain acquis pour servir de sécherie de gouémon à l’utilité des habitants de la commune, d’après un contrat en date du 4 octobre 1788 par le conseil d’Etat ».

Le conseil demande au Préfet du département une « copie du plan du 18 mai 1830 dressé par Monsieur Troude, officier de Marine à Brest, à l’effet d’obtenir la concession gratuite d’un lais de mer situé à Guissény » ainsi qu’une copie du procès-verbal de limitation de cette étendue, « à seule fin d’éviter toutes contestations qui pourraient s’élever entre les concessionnaires de ce lais de mer et les habitants de la commune, dans ce temps présent et futur ; outre pour servir d’éclaircissement aux autorités de la commune pour la propriété, dont les conseillers municipaux prennent intérêt, vraiment très indispensable aux habitants, qu’on est sur le point d’usurper par les concessionnaires qu’on a déjà parlé ».

Le 24 février 1833, le conseil municipal autorise le maire "de mettre opposition sous le plus bref délai possible, sur des envahissements qui se fait journellement sur la sécherie de gouémon appartenant à la commune, par les ouvriers de M. Derrien, concessionnaire d’un lais de mer, donnant près du même endroit ; lesquels depuis plusieurs mois n’ont cessé de prendre des matériaux du lieu du Squéis pour mettre à la digue qu’ils ont construit, abus que nous voulons faire cesser le plus tôt possible et requérir dédommagement, des dommages qu’il aurait occasionné sur cette étendue ; en tout cas qu’ils veuillent continuer même envahissement et usurpation de matériaux de ce terrain, de les citer par devant justice correctionnelle au besoin, dont la commune répondra des dépenses et frais de citation qu’il aurait été obligé de faire pour la défense de cette propriété".

Les choses semblent s’arranger par la suite et un règlement à l’amiable est recherché par une commission composée de 6 commissaires, nommés par la municipalité, et de M. Derrien. Les commissaires sont Goulven Breton, maire, de Brendaouez, Yves Tigréat, second adjoint, Goulven Borgne, conseiller, de Trérohant, Jean Lossec, conseiller, de Kermarro, Sezny Roudaut, de Poultoussec, et Jean-Marie Géléoc, de Kerandraon.

Guillaume Louis Marie Derrien est « fermier de la totalité de la palue dite tréas-an-naouès, et propriétaire d’un indivis dans la dite palue qui vient d’être conquise sur la mer au moyen de la digue qu’il a construite dans le courant de l’année 1832, le tout en exécution de l’ordonnance royale du 15 septembre 1831 ; le dit Derrien agissant tant en son nom que comme fondé des pouvoirs de Dame Veuve Etiennette Duparc Gautier, Veuve Mervin et autres intéressés dans la sus-dite palue ».

La commission désire régler à l’amiable et déterminer d’une manière avantageuse pour toutes les parties intéressées, « la direction et la largeur des chemins qui sont nécessaires pour la fréquentation de la grève, et dont les concessionnaires de la palue de tréas-an-naouès doivent le sol au titre de l’article sept de l’ordonnance précitée »….

(à suivre…)

Fascicule consultable au local de Spered (le samedi de 14h30 à 16h30), à Ti an Oll, à Guissény.

La récolte du goémon

Sécherie

Histoire d’un conflit entre Plouguerneau et Guissény au XIXe siècle pour la possession de la Sécherie au Curnic, espace essentiel pour la récolte du goémon.

Les communes littorales présentent une particularité : deux mondes bien différents y coexistent, le Menez et l’Arvor. Dans le Menez, l’économie est strictement agricole, les fermes sont assez importantes, les champs assez vastes et en général entourés de talus. Sur l’Arvor, l’économie est mixte : les paysans possèdent de petites fermes mais sont goémoniers en même temps ; les pêcheurs ont aussi leur lopin de terre ; les champs, petits et très fragmentés, s’inscrivent dans un espace ouvert : les mezou.

Ainsi, le chanoine Uguen présente-t-il Guissény : « La paroisse de Guissény, située sur la Manche, forme deux parties nettement distinctes : la plaine qui, comme étendue, n’occupe que le tiers de la paroisse mais comme importance vaut plus que la moitié, qui produit des récoltes tout à fait supérieures ; la montagne, « ar menez », ou encore « varlachou », si l’on peut appeler montagne une terre de 50 à 70 mètres au-dessus du niveau de la mer. Dans cette partie, le sol est moins riche mais les fermes sont plus étendues. Dans la plaine, rares sont les fermes qui ont plus de 15 journaux, tandis que, dans la partie haute, on trouve des fermes qui ont 25, 30 journaux ; il n’y a que trois ou quatre fermes qui dépassent 40 journaux… Guissény est baigné par la mer sur une longueur de six kilomètres ; les côtes sont basses, sablonneuses en grande partie ; une digue, reconstruite en 1834, d’environ 600 mètres de long, a fait gagner sur la mer une grande quantité de terrain qui produit beaucoup de seigle et surtout des pommes de terre. Ce terrain est divisé en parcelles d’environ 10 ares, et loué, par la compagnie qui a construit la digue, de 5 à 6 francs chaque parcelle. De tous les points de la paroisse, on loue ces parcelles ; la mer étant à proximité, on les fume avec le goëmon4, et l’on obtient à peu de frais d’excellentes récoltes. C’est surtout dans les années de sécheresse que la récolte est bonne, car le sol est très humide, recevant les eaux des collines voisines de sorte qu’il ne demande qu’à être chauffé par le soleil pour produire du seigle et des pommes de terre de qualité. Cette plaine gagnée sur la mer et le village voisin s’appelle Le Curnic : les habitants, les Curniquois, logent dans des chaumières creusées dans le sable, basses, couvertes de chaume, n’ayant qu’une petite fenêtre du côté du Midi, car des ouvertures du côté de la mer donneraient trop de prise au vent du large. C’est une population à part, vivant de la récolte du goëmon, qu’ils brûlent pour en faire de la soude ou vendent aux villages éloignés de la mer… » Plus loin il ajoute : « Le Curnic d’aujourd’hui n’est plus du tout le Curnic d’autrefois. Combien de fois n’ai-je pas entendu moi-même les Curniquois me dire : « Nous avons été pauvres autrefois M. le Recteur, mais nous ne le sommes plus, Dieu merci ». Et de fait, ils ont loué un peu partout sur la côte des champs et des prairies, et en plus de leurs ressources d’autrefois, ils ont trouvé une source de plus de bien-être dans le commerce du pioca. Le pioca est une espèce de goëmon blanc pris au large dans les grandes marées, et qui sert à faire des plats doux délicieux. Aussi possèdent-ils aujourd’hui chevaux, vaches et charrettes, ce qui était très rare autrefois. Ils ont abattu leurs chaumières insalubres, ou plutôt leurs taudis, et construit des maisons neuves mieux aérées, soit en moëllon, soit en briques de ciment. Bientôt une belle grande source de richesses. Pourvu que ce ne soit pas au moins pour plusieurs une cause de ruine morale ».

Un procès-verbal de l’amirauté de Léon, dressé en 1726, fournit des renseignements sur la pêche en mer et la flottille de pêche des ports de la côte ; pour Guissény, il signale : « on se contente de récolter du goémon ; il n’y a plus de pêcheurs ».

Chaque paroisse côtière a son « armorique », un quartier littoral, une zone qui, d’ailleurs, est souvent en voie de rétrécissement, du fait de la progression des sables (exemple de Tréménach à Plouguerneau au début du XVIIe siècle). Ces « armoricains » qui trouvent dans la pêche à pied des coquillages et des crustacés un complément de nourriture, sont en outre les premiers bénéficiaires des amendements et engrais marins que constituent les sables coquilliers (permettant de lutter contre l’acidité des sols) et surtout les algues (notamment le goémon sar, ou goémon noir, ou varech).

(à suivre…)

Fascicule consultable au local de Spered (le samedi de 14h30 à 16h30), à Ti an Oll, à Guissény.

Le château de Penmarch

Penmarch

Histoire du château de Penmarc’h, en Saint-Frégant (trève de Guissény jusqu’à la Révolution) et des seigneurs, barons de Penmarc’h, devenu un moment collège au XIXe siècle, puis aérium pour les petits brestois malades au XXe siècle.

Le château de PENMARC’H, dans la commune de Saint-Frégant, se trouve à proximité de l’intersection des routes de Lesneven à Plouguerneau d’un côté et de Brest à Guissény, par Plouvien et Loc-Brévalaire, de l’autre côté.

L. FARCY le présente en 1930 : "son donjon carré au toit d’ardoises, orné de deux girouettes, émerge fièrement de la verdure environnante (ou du moins de ce que la ville de Brest a pu heureusement arracher à la cognée des vandales modernes). C’est le château de Penmarc’h, berceau et, pendant plusieurs siècles, résidence d’une noble famille alliée aux plus grands noms de Bretagne et qui, abandonné et tombé en quasi déshérence, semblait voué comme nombre de ses voisins (Carman, par exemple, tout proche), à la ruine et à la démolition, lorsqu’une intelligente initiative le fit acheter par la Ville de Brest pour servir d’abri aux enfants dont les poitrines délicates ne peuvent supporter l’air vif de Porspoder". Et désormais "les petits enfants pauvres de Brest qui ne vont pas à la mer iront pendant les vacances se reposer et se fortifier sous les grands arbres séculaires de l’antique demeure des Seigneurs de PENMARC’H".

Louis LE GUENNEC en fait, à la même époque, la présentation suivante : "Penmarc’h est formé de deux corps de logis réunis en équerre, avec une porte gothique au-dessus de laquelle se lit le millésime 1540 inscrit en chiffres arabes, ce qui, à cette date, constitue en Bretagne une insigne rareté. La ligne des toits est coupée de riches lucarnes sculptées à pignons garnis de crochets et amortis par un fleuron. Derrière, un pavillon carré flanqué d’une tourelle à cul-de-lampe domine l’édifice de ses flèches aiguës et contient un monumental escalier de granit. A l’extrémité de l’aile gauche se trouve la chapelle, dédiée jadis à Saint Antoine, dont le bel autel de pierre a été barbarement jeté dehors. En face, appuyée à une construction carrée, se dresse une tour ronde à mâchicoulis, coiffée d’un toit en poivrière que termine un campanile. Cette tour, qui défendait autrefois un portail extérieur disparu, contient une curieuse cheminée Renaissance".

Le château est mis à sac lors des Guerres de la Ligue en 1594. Puis en 1715, il subit un incendie qui détruit le grand corps de logis ainsi que le pavillon et l’une des ailes. Le châtelain peut restaurer une grande partie sans modifier l’architecture primitive, lui donnant son allure d’aujourd’hui.

En 1745, une déclaration fournit la liste des proches dépendances du château : "le manoir et château de Penmarc’h en la trève de Saint-Frégant, chapelle, cour et arrière-cour closes, jardins, vergers, aire, écurie et autres logements couvertes de bleds, maison à four couverte d’ardoises, le tout cerné de hautes murailles"…

La mort du dernier seigneur de PENMARC’H en 1804 entraîne la dispersion des biens de la famille dans les années suivantes : Monsieur de Crésolles qui avait déjà hérité du manoir de Lesguern, également à Saint-Frégant, devient le nouveau propriétaire du château et de ses dépendances. Comme il n’a pas l’intention de l’occuper, il le loue à l’abbé Le Poulzot qui y installe une institution scolaire entre 1811 et 1817. Par la suite, Monsieur de Crésolles prend l’habitude d’y résider à la belle saison.

Le Chevalier de Fréminville, qui visite le château au cours de son voyage dans le Finistère en 1832, le décrit comme un édifice bien conservé, avec deux ailes et à l’extrémité de l’aile droite, une tour ronde. L’aile droite qui manque aujourd’hui existait donc bien à cette époque. « Je m’arrêtai à Lesneven, et le lendemain matin je fus voir à une lieue de cette ville le beau château de Penmarc’h. Cet édifice, entièrement gothique et bien conservé, consiste en un corps-de-logis avec deux ailes,percés de nombreuses fenêtres décorées selon le goût du quatorzième siècle ainsi que la grande porte d’entrée. Derrière le corps-de-logis principal est un pavillon carré auquel est adossé une tourelle ronde qui surmonte tout l’édifice. Cette tourelle servait à placer la guaître ou sentinelle du château.

A l’extrémité de l’aile droite est une forte tour ronde ayant une galerie crénelée et des machicoulis : cette tour est recouverte d’un toit surmonté d’un béfroi. La famille de Penmarc’h est ancienne et a produit plusieurs chevaliers de distinction ; elle avait pour devise ces mots bretons Prest Ve, il est à propos ».

En 1876, le château passe dans la famille de Montarby et le général de Montarby y fait d’importantes réparations.

C’est en 1922 que le château est acquis par la ville de Brest pour en faire une école de plein air pour les petits brestois maladifs.

Soixante-dix ans plus tard, en 1992, le château est revendu par la ville de Brest et redevient propriété privée. Le nouveau propriétaire a l’intention d’entreprendre la restauration de l’édifice et de le rouvrir aux visiteurs dans quelques années.

(à suivre…)

Fascicule consultable au local de Spered (le samedi de 14h30 à 16h30), à Ti an Oll, à Guissény.

Le grand saint Eloi

. « Le grand saint ELOI » (auteur : Pierre LEPEE), 12 pages de textes et photos.

Au cours de l’année 2012, Spered a édité deux fascicules en production interne (imprimante et photocopie) qui sont disponibles auprès de l’association moyennant une participation aux frais de reproduction.

Fascicule consultable au local de Spered (le samedi de 14h30 à 16h30), à Ti an Oll, à Guissény.