La motte castrale

La motte castrale de Castel-al-Lez

La motte castrale de Castel al Lez.

La motte castrale, ancêtre du château-fort, se situe à l’extrémité ouest de la commune, en limite avec Plouguerneau.

Ces mottes sont apparues un peu partout en Europe au début du XIe siècle et ont cessé d’être utilisées vers le XIIIe siècle. Leur construction correspond à une période d’insécurité ; les seigneurs locaux ne disposaient que de faibles ressources et ne pouvaient entreprendre des constructions de pierre.

Ils pouvaient utiliser les paysans de leur domaine pour creuser le sol, charrier la terre nécessaire à l’édification de la motte, abattre les arbres et préparer le bois pour la construction de la tour.

Par la suite, les seigneurs les plus importants ont pu remplacer la tour de bois par un donjon de pierre, placer un pavage de pierre sur les flancs du tertre et même rajouter des remparts.

La motte de Castel al Lez s’élève un peu en retrait et au sommet du versant qui domine la Palud du Curnic, à l’extrémité ouest de la commune de Guissény. Elle mesure 64 à 74 mètres de diamètre à la base et est entourée d’un fossé large de 6 à 8 mètres.

En contrebas de la motte, se trouve la « basse cour », les bâtiments d’exploitation agricole et les maisons des paysans, avec parfois une chapelle.

Elle est séparée de la basse cour par le fossé qui entoure le monticule.

La ferme a été implantée à une cinquantaine de mètres au sud-ouest du tertre.

La motte est haute de 6 à 7 mètres par rapport au fond du fossé profond de 3 à 4 mètres.

La plate-forme mesure 30 à 40 mètres de diamètre : elle a un profil en cuvette.

Des pierres y auraient autrefois été récupérées et, selon la tradition, il existait un « tunnel ».

La motte domine la baie du Vougot ; de son sommet, on pouvait surveiller la mer et voir arriver d’éventuelles flottes d’envahisseurs, comme les Normands.

Le site de Kermaro

Un site gaulois à Kermaro

LE SITE ARCHEOLOGIQUE DE KERVARO EN GUISSENY

Description sommaire

Le site de Kervaro est érigé sur une parcelle de plus de 2000 m2 au nord-Ouest du hameau du même nom, dans une légère dépression proche de la courbe de niveau des 50 mètres dominant le palud du Curnic. Limité dans sa partie orientale par un talus bordé d’un fossé intérieur et dans sa partie sud par un muret ancien, le site abrite une ruine faite de grosses pierres ainsi qu’un nombre important d’autres roches affleurantes disséminées sur la parcelle, deux d’entre elles, sur la partie nord, de forme arrondie faisant penser à des meules grossièrement taillées.

Petit historique

Au début des années 50 cet espace était encore très ouvert. C’est ainsi que Bertrand Lagadec le découvrit grâce à son père au cours d’une partie de chasse. Il y revint plus tard avec sa famille et y pratiqua quelques fouilles. Il me convia peu après à me livrer à l’exploration du site.

Laissé à l’abandon pendant de nombreuses années, ce dernier était encore relativement accessible en 1997, à condition d’en connaître le passage pour y pénétrer. Sur mes indications, un ami brestois passionné d’archéologie put ainsi dresser un plan coté de l’habitat existant.

Plan

Sept ans plus tard, soit en 2004, la végétation intrusive composée de prunelliers sauvages, d’aubépines et de ronciers géants avait envahi tout l’espace et rendu la parcelle pratiquement inaccessible. Cependant en compagnie de Bertrand, je réussis à trouver un autre passage et ainsi à nous frayer un chemin, (au coupe-coupe et à la tronçonneuse !) jusqu’à cette ruine qui à nos yeux n’était autre qu’un dolmen sans sa table, sorte de début d’allée couverte datant de l’époque néolithique.

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1re visite sur le terrain

J’alertai alors Monsieur Le Goffic, Conservateur en chef du service archéologique du Finistère, lequel confirma que ce site n’était pas répertorié et qu’une visite l’intéressait vivement. Rendez-vous fut pris pour octobre 2004.

M. Le Goffic identifia ces pierres non pas comme des vestiges d’une allée couverte mais plutôt comme ceux d’un habitat du Haut Moyen âge, c’est à dire pouvant se situer entre le VIe et le IXe siècle.

C’était à son avis une découverte intéressante car rares sont les vestiges de l’époque médiévale en Bretagne. Il put voir aussi les pierres rondes sans toutefois en identifier l’origine. Néanmoins la communication très intéressante qu’il publia dans le bulletin archéologique du Finistère de l’année 2005 et reproduite ci-après, n’aboutit pas à une conclusion définitive sur l’origine de ce petit bâtiment.

Guissény, Kervaro [Michel Le Goffic - Bulletin archéologique du Finistère (2005)]

"Le hameau de Kervaro, perché sur le haut de la falaise morte, domine d’une cinquantaine de mètres la palud du Curnic. Dans les fourrés de prunelliers et de ronces qui se trouvent à 200 m à l’ouest, en bordure de la rupture de pente, l’attention de notre sociétaire M. Jacques Buttet a été attirée par des structures de pierres qui l’ont intrigué et qu’il nous aimablement fait connaître. La progression à travers les épineux est particulièrement difficile et ne permet pas d’avoir une vision éloignée des accidents de terrain. Néanmoins, nous avons pu reconnaître des talutages formés de pierres dressées et de terre, prenant souvent appui sur des effleurements naturels de roche ou sur des blocs dégagés par l’érosion météorique. Un petit bâtiment, constitué de grosses pierres sur chant, la plus grosse atteignant 2,55 de longueur et dont la hauteur ne dépasse pas le mètre, a une surface interne de 7m2 environ, en forme de trapèze de 2.45 de grande base, 2 m de petite base et 3.05 m de hauteur. Il y a une quarantaine d’années, une fouille partielle a eu lieu dans cette structure et elle a fourni un lot important de tessons de faïence, de grès, de verre, des fragments d’assiettes à marli, de bols, de bassins à glaçure interne, etc., qui témoignent d’une occupation entre le XVIe siècle et le début du XXe siècle. Cependant, plusieurs tessons sont nettement plus anciens et datent de l’âge de fer, période de La Tène. Ce site, qui n’a jamais été labouré, constitue donc une »réserve archéologique » qui ne manquera pas d’intéresser les archéologues du futur. La parcelle la plus intéressante est la n° 9 section A du cadastre de 2005, mais toutes les parcelles circumvoisines font partie de ce site, dont l’épicentre a pour coordonnées Lambert : x =100,550 ; y = 1124,750, à une altitude de 50 m".

2e visite

En octobre 2009 en prévision de la visite sur des sites répertoriés de La Commune, dont celui de Kervaro, une équipe de « Spered Bro » s’est attelée au travail de débroussaillage car en cinq ans tout avait disparu sous la même végétation.

Pour le public guissénien participant à cette visite ce fut une heureuse découverte. Mr Le Goffic confirma sa première analyse, à savoir que l’on était vraisemblablement en présence d’un habitat du Haut Moyen et qu’il serait intéressant de dégager les autres pierres pour mieux appréhender son insertion dans la parcelle.

Des personnes d’un certain âge du hameau de Kervaro ayant emboîté le pas aux visiteurs ont pu apporter un témoignage intéressant : leurs parents racontaient que cet habitat abritait autrefois une famille. Il était alors recouvert d’un toit constitué de branchages lequel fut un jour détruit par un incendie et les choses en restèrent en l’état.

Comme le montrent le texte et le croquis ci-dessous, le site de Kervaro une fois dégagé pourrait révéler d’étranges similitudes avec une implantation datant du Haut Moyen Age.

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L’Habitat au Haut Moyen Age (6e au 8e siècle) en Bretagne [d’après la maison paysanne en Bretagne, ouvrage de Noël-Yves Tonnerre]

Groupés en enclos, ces habitats se trouvent plutôt en hauteur, abrités par la crête sur de légères pentes sud.

Matérialisés par des murets de pierres généralement curvilignes de 50 à 80 mètres, ces enclos comportent deux ou trois maisons rudimentaires, abritent le bétail et les jardins, les champs se trouvent à l’extérieur, souvent limités par des fossés.

Les maisons, d’environ 7 mètres sur 3 intérieurement, sont rectangulaires. Les murs bas (de 1 à 1.5 mètres) sont constitués de gros blocs de pierre dont les interstices sont comblés de tout venant, Un passage est aménagé en bout.

La couverture est assurée par une charpente faite de branches et couverte de fascines et de chaumes. Il n’y a pas de cheminée.

Vers l’extrémité opposée à l’accès une tranchée transversale sert de séchoir à grain et jouxte le foyer.

Ce type d’habitat est dans la continuité de l’habitat gaulois et a sans doute été occupé, ne serait-ce que comme étable, pendant plusieurs siècles.

Dessin de Michaël Batt du Service Régional d’Archéologie

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Conclusion

La recherche et la découverte d’un site restent chose passionnante. Celui de Kervaro encore dans la mémoire des anciens habitants du hameau mais restée longtemps ignoré des guisséniens, a enfin été répertorié à l’inventaire des sites archéologique du Finistère.

Son origine remonterait à une époque sur laquelle on a peu de renseignement. Dans son incontournable « Histoire de la Bretagne et des Bretons », Joël Cornette écrit : « Après la disparition de Grégoire de Tours en 594, nous perdons notre principal informateur : pour un siècle et demi, les Bretons échappent aux historiens, faute de sources… ».

On pourrait donc situer son origine entre les « règnes » de Judicaël (époque de Dagobert) et de Nominoë (époque de Charles le Chauve).

On pourrait aussi avancer l’hypothèse d’une réoccupation des lieux, lesquels remonteraient à une époque beaucoup plus ancienne, comme l’ont pensé les « découvreurs » du site en présence des grosses pierres fermant la partie nord de l’habitat. Peut-être qu’une fouille complète pourrait-elle apporter une réponse à ce questionnement.

Jacques Buttet

Les pirates

Les Vikings, attaques des pirates sur la côte

Les attaques des pirates sur la côte

Commencées à la fin de l’occupation romaine, les incursions des pirates scandinaves continuèrent au début du Moyen Age. Les Germains continentaux prirent l’habitude d’appeler les Scandinaves « les hommes du nord », donc « Nordman » qui devint Normand. Ce mot, malgré sa forme exotique, fut adopté tel quel par les populations romanes de la Gaule. Puis vint l’appellation de Vikings.

Ces « païens du nord » déclenchent brusquement une vague d’incursions aux alentours de l’an 800 et, pendant près d’un siècle et demi, ils ravagèrent les côtes occidentales. Les guetteurs sur nos côtes fouillaient des yeux la haute mer et tremblaient d’y découvrir les proues des barques ennemies ; et les moines, dans leurs scriptoria, étaient occupés à noter les pillages.

Les rites funéraires permettent de se représenter avec précision une flotte normande : la tombe des chefs était composée d’un navire, caché sous un tertre de terre amoncelée. Les « longues nefs » qui répandirent la terreur en Occident étaient des barques non pontées, par l’assemblage de leur charpente, chefs-d’œuvre d’un peuple de bûcherons, par l’adroite proportion des lignes créations d’un grand peuple de matelots. Elles étaient longues, en général, d’un peu plus de vingt mètres et pouvaient se mouvoir soit à la rame, soit à la voile. Elles portaient chacune, en moyenne, de quarante à soixante hommes (sans doute passablement entassés). Leur rapidité atteignaient, sans peine, une dizaine de nœuds. Le tirage d’eau était faible : à peine plus d’un mètre : un grand avantage lorsqu’il s’agissait, quittant la haute mer, de s’aventurer dans les estuaires, voire remonter les fleuves.

Drakkar

Pour les Normands, les eaux n’étaient qu’une route vers les proies terrestres. Si les voiles et les rames ne suffisaient pas, on avait recours au chemin de halage. Souvent pour ne pas trop charger les nefs, un détachement suivait pas voie de terre. Fallait-il gagner les bords par des fonds trop bas ? Ou se glisser, pour une razzia dans une rivière trop peu profonde ? Les canots sortaient des barques. Ces merveilleux marins ne craignaient nullement la terre, ses chemins et ses combats. Ils n’hésitaient pas à quitter la rivière pour se lancer, au besoin, à la chasse au butin. Les pillages étaient fructueux ; la terreur que, par avance, ils inspiraient ne l’était pas moins.

Le débarquement aurait eu lieu sur la côte de Guissény-Kerlouan et notamment dans l’embouchure du « Roudouhin » (ou Roudoushir, rivière de Guissény) : « Un beau jour une flotte normande déposa sur l’une des grèves du littoral léonais, à quatre ou cinq lieues nord de Lesneven, une armée piratique qui se répandit aussitôt dans la campagne, pillant, brûlant, ravageant ces champs, ces maisons fraîchement relevées, et se dirigeant sur la résidence du comte ».

En 875, Lesneven, alors dépourvue de fortifications, fut prise et détruite : tout le pays fut transformé en désert . En 937, le Comte Neven, qui a reconstruit à Lesneven une belle forteresse en terre à la mode de ce temps, s’opposa à ne nouvelle attaque des Normands.

Le débarquement aurait eu lieu sur la côte de Guissény-Kerlouan et notamment dans l’embouchure du « Roudouhin » (ou Roudoushir, rivière de Guissény) : « Un beau jour une flotte normande déposa sur l’une des grèves du littoral léonais, à quatre ou cinq lieues nord de Lesneven, une armée piratique qui se répandit aussitôt dans la campagne, pillant, brûlant, ravageant ces champs, ces maisons fraîchement relevées, et se dirigeant sur la résidence du comte ».

Ne faut-il pas aussi rapporter à cette campagne d’EVEN le Grand contre les Normands ce que dit « La Vie de saint Guénolé » sur les combats menés par saint FRAGAN, son père, contre les pirate païens : « certains pirates païens que Fragan avait déjà chassés de Léon, revinrent en plus grand nombre, résolus de prendre terre et s’y habituer ; leur flotte ayant paru en mer, l’alarme se donna à la côte et Fragan, ayant amassé une petite armée à la hâte, encouragé par saint Guénolé, marche vers le rivage de la mer pour empêcher l’ennemi de descendre. Étant en la paroisse de Guissény, près de Lanvengat, ils aperçurent la flotte ennemie en rade, si épaisse que les mâts des navires semblaient représenter une forêt : ce qu’étant vu par le conducteur de l’avant-garde, il s’écria « Me a vel mil guern », c’est-à-dire « je vois mille mâts de navires ».

CroasMilhorn

En mémoire de quoi, après la bataille, fut dressée en ce lieu une croix qui, encore à présent, s’appelle « Croas ar mil guern ». Les pirates se sentant découverts, se rallièrent dans les tranchées de leur camp, ne voulant donner combat. Mais les Bretons les assaillirent de telle furie que, les y ayant forcés, ils taillèrent la plupart en pièces, exceptés quelques-uns qui se sauvèrent à la nage vers leurs vaisseaux, desquels plusieurs furent brûlés. Pendant le conflit, saint Guénolé, comme un autre Moïse, priait avec grande ferveur. Après la victoire, il exhorta son père et les chefs de l’armée d’employer le butin pris sur les ennemis pour bâtir un monastère en l’honneur de la Sainte Croix, au même lieu où fut donnée la bataille, qui s’appelait « An Isel-vez » en la paroisse de Plounévez : ce qui fut fait et nommé « Loc-Christ », riche prieuré, à présent presque désert et sécularisé ».

Chapelle de Lochrist

La bataille décisive se produisit dans la vallée de la Flèche où Neven écrasa les pirates (Runeven en Plouider). « Les Pirates, se sentant découverts, se rallièrent dans les tranchées de leur camp, ne voulant donner combat, mais les Bretons les y assaillirent de telle furie, que, les ayant forcés, ils taillèrent la plupart en pièces, excepté quelques uns qui se sauvèrent à la nage vers leurs vaisseaux, desquels plusieurs furent brûlés".

Croix de Runeven

Les Normands prennent la fuite par Kerlouan (d’où ils étaient partis) et ne reviendront jamais. Le site est identifié à Kerlouan par un très vieux chêne qui domine le rivage.